Léon Trotsky : Lettre au S.I. (20 mars 1934) [Source Léon Trotsky, Œuvres 3, Novembre 1933 – Avril 1934. Institut Léon Trotsky, Paris 1978, pp. 285-287, titre : « Sur la fusion projetée aux États-Unis », voir des annotations là-bas] La tentative de fusion est très intéressante et très symptomatique. Elle montre que l’affaire du S. A.P. et de l’O.S.P. n’était pas un hasard et ne l’est toujours pas, mais qu’elle se situe dans la voie du développement ultérieur du mouvement ouvrier révolutionnaire. Il nous a fallu, il nous faut et il nous faudra passer par de telles tentatives et expériences dans tous les pays, et même plusieurs fois dans la plupart des pays. Politiquement, l’American Workers Party ne vaut guère mieux que le S.A.P. Les dangers inhérents à la fusion prochaine sont évidents. Mais les camarades américains ne se bouchent pas les yeux là-dessus, comme on le voit d’après la lettre du camarade Swabeck. Ils comprennent parfaitement qu’il s’agit d’un parti centriste qui évolue vers la gauche. Le camarade Solow, un ami de la Ligue, m’écrit que Muste serait, au sein du groupe dirigeant de l’A.W.P., le plus capable d’évoluer (c’est d’ailleurs un ancien compagnon de route). Les arguments avancés par le camarade Swabeck, au nom de la direction, en faveur de l’unification, sont d’un grand poids. Nos camarades sont plus nombreux, mieux formés théoriquement, et ne se font aucune illusion sur les difficultés à prévoir dans le travail en commun. D’ici, il est très difficile de donner un avis sans connaître tous les éléments de la situation, notamment les questions de personnes. Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Cette décision, nos amis américains doivent la prendre eux-mêmes. Il suffit que nous leur exprimions notre confiance dans ce domaine. On pourrait peut-être formuler avant tout les souhaits suivants : a) une concertation d’au moins deux mois, où nos camarades s’exprimeraient dans les réunions de l’A.W.P., et les gens de Muste chez nous ; il y aurait aussi des soirées de discussion commune. b) l’unification formelle doit s’accompagner de conférences des deux organisations, avec représentations respectives, afin que nous puissions reconnaître en toute clarté les groupements internes de l’A.W.P. c) il faut que la rédaction de l’organe théorique soit correctement contrôlée, afin que le travail d’éducation soit conduit dans un esprit réellement marxiste. d) il faut créer un bulletin intérieur sérieux et paraissant régulièrement, où l’on fera apparaître toutes les questions pendantes. e) pour l’éducation commune des jeunes, il faudra trouver des formes correspondant à nos buts politiques. f) il est souhaitable que la déclaration des quatre soit citée comme référence dans la plate-forme commune. Tels sont à peu près les souhaits qu’on pourrait, à mon avis, formuler d’ici. Comment se présentera la position du parti une fois unifié sur le plan international ? Ou bien il rejoindra directement le secrétariat international, ou bien, si entre temps, l’A.W.P. n’y est pas favorable, le parti unifié pourra rejoindre directement ce qu’on appelle le bloc des quatre, qui deviendra alors le bloc des cinq, et nous ouvrira de nouvelles possibilités au cas où le S.A.P. et l’O.S.P. continueraient leur sabotage passif. Le parti unifié pourrait entrer à la fois dans le S.I. et dans le bloc des quatre. |
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